La civilisation s’oppose à la barbarie, elle en est l’exact inverse, le diamétral opposé.
Elle naît de la conscience d’hommes et de femmes porteurs de sens, qui refusent de s’abandonner au mal et, contribuent par leur fécondité sociale à promouvoir la vie, la santé, l’éducation, l’art, les droits fondamentaux.
Ces hommes et ces femmes ancrent leurs démarches dans une forme d’humanisme, un ensemble de valeurs positives, un idéal bénéfique pour l’être humain.
Au premier rang de cette lutte contre le mal, des médecins, des professeurs, des soldats, des bâtisseurs et, tant d’autres, combattent sans compromis toute érosion permettant au mal de l’emporter: «Car, j’ai vu trop souvent la pitié s’égarer» écrivait Antoine de Saint-Exupéry (Citadelle).
Pégase magnifie depuis longtemps cette voie dans l’esprit humain...
La civilisation s’oppose à la barbarie, elle en est l’exact inverse, le diamétral opposé.
Elle naît de la conscience d’hommes et de femmes porteurs de sens, qui refusent de s’abandonner au mal et, contribuent par leur fécondité sociale à promouvoir la vie, la santé, l’éducation, l’art, les droits fondamentaux.
Ces hommes et ces femmes ancrent leurs démarches dans une forme d’humanisme, un ensemble de valeurs positives, un idéal bénéfique pour l’être humain.
Au premier rang de cette lutte contre le mal, des médecins, des professeurs, des soldats, des bâtisseurs et, tant d’autres, combattent sans compromis toute érosion permettant au mal de l’emporter: «Car, j’ai vu trop souvent la pitié s’égarer» écrivait Antoine de Saint-Exupéry (Citadelle).
Pégase magnifie depuis longtemps cette voie dans l’esprit humain, la force au service du bien, il met sa puissance au service de la Vie.
Pour trouver cette force, une voie consiste à appliquer son corps à la discipline et pratiquer une méditation l’unifiant avec l’esprit. Alors, le vide et le silence intérieur peuvent advenir pour renouer avec une vision originelle, représentation première d’une vitalité intacte, d’une énergie créatrice dont se construisent les civilisations.
Cette sculpture de Pierre Le Caër représente ce chemin de l’action. Elle est tempérée par une recherche d’équilibre de la forme afin que, non seulement «la sculpture tienne debout» comme il aime à le dire, mais, surtout, qu’au-delà d’un regard puissant, se dégage d’elle une aura bienveillante. Démarche artistique authentique à partir d’un fond acquis par l’étude et le travail sans concession. Elle témoigne de la voie qui l’anime, du lien particulier que Pierre tisse avec le monde.
De son travail personnel issu d’une ascèse particulière, d’une intégrité et d’un effort constant pour se simplifier, Pierre retient, pour la présenter, l’idée qu’il se fait au fond de l’efficacité du bien.
Le travail du métal de Pierre Le Caër affirme une essence martiale que la beauté et l’équilibre du mouvement tempèrent pour la placer adroitement mais résolument du côté d’un humanisme assumé.
Pégase prend la forme du dragon, porteur de feu, à l’encolure musclée, aux ailes majestueuses, déployées comme en plein vol.
Il personnifie l’énergie créatrice et l’immortalité du guerrier. Il vient du fond des âges, de nombreux endroits du monde.
Représenter le dragon signifie remonter à la source, à la force première, immémoriale.
C’est créer un lien par-delà les époques, recueillant d’anciens héritages, acceptant de s’inscrire dans une chaîne de savoirs millénaires, dans une lignée faite de secrets de combats, de nerfs, de luttes, de savoirs ancestraux transmis depuis l’origine pour que vive aujourd’hui un humanisme volontaire.
De lestes et rapides cavaliers peuvent se sentir ainsi portés par leurs chevaux comme sur les ailes d’un dragon. «Pour l'étalon, son allure tenait moins de la course que du vol. Suspendu, étendu dans l'air, il ne touchait le sol que pour s'en détacher d'un seul battement.»
- Joseph Kessel - (Les cavaliers).
La puissance du dragon est cependant adoucie par ses ailes, des ailes immenses en mouvement comme la pensée.
Le travail de la forme structure l’équilibre réussi de cette sculpture. Il lui confère une expression de sérénité.
L’équilibre en dit autant que le fond, et, c’est vrai, bien sûr, au-delà de la création artistique.
Plus il y a de pouvoir dans l’être humain, plus grande est sa responsabilité et, primordiale, sa manière de faire.
Seule une forme équilibrée sauve le pouvoir et l’empêche de sombrer en chimère.
L’artiste présente ses sculptures comme des objets qui tiennent debout, des «tatemono» en japonais.
Il s’agit d’un point essentiel qui signifie que l’équilibre canalise l’énergie, la puissance, le pouvoir, destructeur sinon.
C’est le travail sur soi pour trouver l’équilibre qui permet à l’être humain de se réaliser, d’adopter une philosophie bienveillante, de nouer des relations paisibles et de collaborer avec autrui.
Nous sommes en présence d’une œuvre personnelle qui invite l’être humain à s’élever par une introspection nécessaire pour contrôler sa force et la conserver, humaniste dans le gouvernement des hommes.
Ses ailes immenses lui donnent comme une force mystique, mystérieuse, elles ouvrent sur l’imagination.
Leur amplitude, leur battement semble pouvoir atteindre une indicible, une vertigineuse hauteur.
Pégase signifie-t-il que l’être humain doive se doter d’un allié divin? Pas forcément, car le combattant se méfie des dieux: «Vénérer les bouddhas et divinités mais ne pas compter sur eux», édictait le Samuraï médiéval Miyamoto Musashi (Dokkôdô).
Le Pégase de Pierre Le Caër n’écarte pas la spiritualité, ses ailes immenses lui sont greffées par le divin mais à une condition, que la spiritualité ne devienne pas, elle-même, une aliénation. Il s’agit toujours de la même condition de l’équilibre, du travail sur soi, de l’ascèse personnelle pour éveiller sa conscience, seule possibilité au fond de vivre sans regretter ses actes et ne pas tomber dans le remords qu’illustrait Victor Hugo: «Des mers dans le pays qui fut depuis Assur (...) quand il se fut assis sur sa chaise dans l’ombre, et qu’on eut sur son front fermé le souterrain, l’œil était dans la tombe et regardait Caïn» (La légende des siècles).
Antoine de Saint-Exupéry exprime aussi cette exigence de conscience quand il conclut son œuvre sur sa définition de la spiritualité «Car Tu es, Seigneur, la commune mesure de l’un et de l’autre. Tu es le nœud essentiel d’actes divers» (Citadelle).
La conscience impose, au-delà de la méditation, la seule introspection qui vaille, celle de l’être humain sur lui- même, sur les actes qu’il accomplit chaque jour, sur les choix qu’il fait. Combien de mal serait évité si cette introspection était pratiquée de bonne foi, en son for intérieur hors l’emprise d’institutions promptes à opposer, pour finalement, confisquer à l’être humain sa véritable part de divin.
Le dogme est une aliénation de la pensée qu’une conscience éveillée remet à sa place, préférant à tout discours excessif, le rire, le chant, la danse, l’art, comme moyens d’honorer la création. « Et les bêtes dansaient » écrivait Joseph Kessel (Le lion). Une forme de sagesse consiste, sans que l’esprit prenne le dessus sur le corps, sans que le corps prenne le dessus sur l’esprit, dans une démarche d’unité.
Le travail de sculpteur de Pierre Le Caër s’apparente à une recherche de cet ordre, il délivre ce message de ses mains, la matière collabore avec lui pour faire naître l’expression de sa vision de l’équilibre: une respiration entre force et esprit.
La création artistique permet un échange dont la portée est vaste. L’œuvre d’art a ceci de particulier qu’elle peut créer une forme d’intemporalité pour nouer les fils d’une conversation avec d’autres époques, d’autres œuvres, qu’elle interroge, auxquelles elle répond, formant dans cette discussion des accords résonnants.
À partir des émotions qu’elle procure et des idées qui la fondent, l’œuvre d’art, dégagée du temps, permet de réfléchir sur le sens de la vie. Qu’il est bon, ainsi, de rendre visite à de chers amis pour certains âgés de plus de trois mille ans, tels Gudea, prince de Lagash ou Ebih-Il, scribe aux yeux de lapis-lazuli qui nous transmettent depuis l’éternité leur salut mésopotamien. C’est avec eux, par une association d’idée et de forme, non loin de la stèle noire basaltique du code d’Hammurabi, comme venant d’une lutte éternelle engagée par d’anciens maîtres porteurs de sens, au nom finalement d’une même conception de l’être humain, que dialogue le Pégase de Pierre Le Caër.
Cette œuvre a rejoint une collection privée, mais il existe aujourd’hui dans le pays d’Iroïse, un grand bâtiment près d’un bouquet d’arbres où Pégase compte des centaines de frères et sœurs. Une étape bretonne à ne pas manquer pour l’amateur de sculptures contemporaines.